Abdou Pagoui
Abdou Pagoui
May 31, 2025 at 10:46 AM
Niger | *Ce que vivent les soldats dans le silence, témoignage d’un survivant de l’attaque d’Eknewen* Dans le silence qui entoure nos vaillantes FDS sur la ligne de front, un témoignage bouleversant revient sur l’attaque d’Eknewen, du 25 mai 2025 au nord-ouest de Tillia, dans la zone de défense N°4 où une soixantaine de soldats y ont perdu la vie. Le témoignage met au jour de graves failles dans la chaîne de commandement, un manque de moyens logistiques, et surtout une négligence inquiétante face à un ennemi de plus en plus organisé et équipé mais toujours sous-estimé. Le survivant, interrogé sous couvert d’anonymat, pointe la responsabilité directe à la chaîne de commandement dans la tragédie d'Eknewen. "_Les terroristes nous avaient déjà envoyé des menaces sur les portatifs (Motorola) interceptés, bien avant l’assaut. Ils connaissaient parfaitement notre position et nous observaient en continu_...". Ces avertissements n’auraient suscité aucune inquiétude de nos supérieurs. Pire encore, les indices d’une attaque imminente se sont multipliés. "_Après les menaces, ils ont envoyé des drones pour surveiller notre base. Ils nous filmaient, prenaient des photos, observaient chacun de nos mouvements. Ils avaient une vue complète de notre position. Nos comptes rendus ne sont pas pris au sérieux. Parfois, nos supérieurs se moquaient de nous, en nous disant que nous avions peur (Zolbay)_". La veille de l’assaut, les terroristes auraient transmis un message clair. "_Ils nous ont dit ‘On arrive.’ Et ils ont tenu paroles. Ce qui s’est abattu sur Eknewan ce jour, tout le monde l’a entendu… et personne ne l’oubliera_" L’attaque, selon la source, s’est déroulée en 2 phases. Les assaillants ont d’abord ciblé la position de la GNN, avant de se tourner vers celle des FAN, après un bref échange de tirs. "_Cela a permis à la GNN de se replier vers Télémcès. Les FAN, en revanche, n’ont pas pu se retirer, faute de moyens de transport. Leurs véhicules en bon état avaient quitté la base quelques jours avant la tragédie_… " (probablement pour accueillir les généraux venus assister à la cérémonie de "Tarha N'kal" àTillia, ndlr). À quelques encablures de Eknewan, à la base d’Egarek, située à 50 km de Tillia, les éléments de la GNN ont vécu un scénario similaire. "_Là-bas aussi, les drones ennemis survolaient la zone 2 à 3 fois par jour. Les hommes ont changé de position, mais les drones les ont suivis jusqu’à leur nouvel emplacement, le jour même de l’attaque. Heureusement, le chef de mission a ordonné un repli vers Tillia juste à temps. Lorsque les terroristes sont arrivés, la base était vide; repli qui a déjoué leur offensive_. " Et d'ajouter "_Aujourd’hui encore, on nous demande de retourner sur le terrain, sans appui, sans renfort, sans même un mot pour nous remonter le moral. La réalité, elle est sur place, mais ceux qui décident ne viennent jamais voir ce que nous endurons. Pendant que nous souffrons sans eau, sans véhicules, sans munitions, sans carburant etc... certains ne s'intéressent qu'à toucher les primes de mission. Ce que nous avons vécu là-bas, c’était l’enfer_.", conclut-il. Loin d’être un cas isolé, ce témoignage met en lumière le fossé béant entre les discours charlatanesques sur la sécurité et la réalité à laquelle sont confrontés les soldats en 1ère ligne. Une réalité aggravée par l’indifférence de certaines chaînes de commandement, face à une guerre asymétrique toujours plus structurée. Rappelons-le, pendant que des exercices militaires se déroulaient à Tillia, devant une hiérarchie qui se paradait en uniforme impeccable pour "Tarha Nkal", à quelques kms de là, à Eknewan, ce n’était pas une simulation, mais la réalité. Et, faute de renforts, 64 valeureux soldats sont tombés… abandonnés par un commandement plus préoccupé par la mise en scène, le salon feutré, la lutte traditionnelle, le népotisme.., que par la sécurité proprement dite. _Abdou Pagoui_
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