
EuroScope : la chaîne sur l’Europe
February 18, 2025 at 05:35 PM
**Anticiper la politique militaire de Trump : comment l’Europe doit réagir**
## **Un virage stratégique américain centré sur la Chine**
Avec la nomination d’**Elbridge Colby** au poste de sous-secrétaire à la Défense pour la politique, la doctrine militaire de la nouvelle administration **Trump** devient plus prévisible. Colby est un stratège influent et transparent, connu pour son **priorité absolue donnée à la Chine** comme menace principale des États-Unis.
Cette vision stratégique repose sur plusieurs constats :
1. **La Chine est perçue comme une menace existentielle et urgente** pour les États-Unis, avec une supériorité croissante dans plusieurs domaines militaires et économiques.
2. **Les États-Unis sont militairement et stratégiquement surexposés** et doivent se concentrer sur la dissuasion face à la Chine.
3. **Les alliés américains ne dépensent pas assez pour leur propre défense**, ce qui affaiblit le dispositif militaire occidental.
4. **L’industrie de défense américaine est jugée trop faible** et doit être revitalisée pour un affrontement potentiel avec la Chine.
À travers cette grille de lecture, la politique de défense de Trump aura des conséquences majeures pour l’Europe, qui doit se préparer à un **désengagement partiel des États-Unis** sur d'autres théâtres d’opération, notamment l'Ukraine, et à une **pression accrue pour augmenter son effort de défense**.
## **Vers une hausse drastique des budgets de défense européens**
La première conséquence de cette doctrine est l’exigence de **doubler les dépenses militaires européennes*. Trump a exprimé un objectif de **5 % du PIB**, un seuil que seule la Pologne semble prête à atteindre à court terme.
Les réactions en Europe pourraient être très contrastées :
* **Les pays d’Europe du Nord, centrale et orientale*, directement menacés par la Russie, sont déjà dans une dynamique d’augmentation rapide de leurs budgets militaires. Pour eux, un effort de **4 % du PIB** est envisageable.
* **Les pays d’Europe occidentale et méridionale*, confrontés à des crises économiques et moins menacés directement par la Russie, auront du mal à justifier un tel effort budgétaire. Cela risque de **creuser un fossé au sein de l’OTAN** entre l’Europe de l’Est et les autres membres de l’Alliance.
Si cette fracture se matérialise, elle pourrait conduire Trump à **mettre à exécution ses menaces** de ne plus protéger que les pays atteignant le seuil requis de dépenses militaires.
## **L’Ukraine : une responsabilité européenne à assumer**
La deuxième implication majeure est que **le soutien à l’Ukraine deviendra essentiellement un problème européen*. Trump pourrait considérer que la guerre en Ukraine n’est pas une priorité stratégique pour les États-Unis, sauf si elle s’inscrit dans un **deal financier et militaire avec l’Europe**.
L’administration Trump pourrait ainsi accepter de **continuer à soutenir Kyiv uniquement si l’Europe finance massivement l’achat d’armes américaines** pour l’Ukraine. Ce scénario forcerait les capitales européennes à :
* **Augmenter significativement leurs envois d’armes et de munitions** à l’Ukraine, à court terme, pour éviter un effondrement du front ;
* **Renforcer leur propre industrie de défense**, pour assurer un soutien matériel sur le long terme ;
* **Établir des accords avec Washington** pour garantir l’achat d’équipements américains destinés à Kyiv.
En l’absence de cet engagement, l’Europe risque de voir **la Russie grignoter progressivement l’Ukraine**, à mesure que l’aide militaire se tarit.
## **L’Europe centrale et orientale : de nouveaux alliés stratégiques pour Washington ?**
Face à une Amérique focalisée sur la **menace chinoise*, les États d’Europe centrale et orientale doivent **modifier leur relation avec Washington*. Pour ne pas être perçus uniquement comme des **demandeurs de protection contre la Russie*, ils doivent **devenir des partenaires actifs de la stratégie américaine contre Pékin**.
Plusieurs leviers d’action existent :
1. **Augmenter les budgets militaires** à des niveaux proches des 4-5 % du PIB.
2. **Développer leurs industries de défense** pour soutenir à la fois leurs propres forces armées et l’Ukraine.
3. **Participer aux efforts de sécurité en Asie de l’Est** :
- En **formant des militaires** japonais, sud-coréens, philippins ou taïwanais dans les domaines du cyber, de la logistique militaire et de la défense aérienne.
- En **produisant des milliers de drones** pour la stratégie américaine de dissuasion face à une invasion chinoise de Taïwan.
- En offrant un **soutien politique accru** à Taïwan et aux États alliés des États-Unis en Asie-Pacifique.
En adoptant cette posture, l’Europe centrale et orientale pourrait **s’assurer un rôle stratégique dans la doctrine militaire américaine** et garantir son **ancrage dans l’architecture de défense de Washington**.
## **Un avenir incertain pour l’OTAN et la sécurité européenne**
Si la tendance actuelle se confirme, l’Europe devra **assumer une responsabilité militaire bien plus grande** que par le passé. Cela soulève plusieurs questions critiques :
* **L’OTAN peut-elle survivre si une partie de l’Europe refuse d’augmenter ses dépenses militaires ?**
* **L’Europe occidentale acceptera-t-elle de financer massivement l’Ukraine sans l’aide américaine ?**
* **Les pays d’Europe centrale et orientale peuvent-ils jouer un rôle stratégique en Asie-Pacifique ?**
L’administration Trump pourrait **redéfinir profondément le rôle des États-Unis dans la sécurité transatlantique*, forçant l’Europe à choisir entre **se renforcer militairement** ou **se fragmenter stratégiquement**.
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