Le Méhari Post de Mohamed AG Ahmedou du MTRM
Le Méhari Post de Mohamed AG Ahmedou du MTRM
May 31, 2025 at 05:09 AM
Niger: Boumba-Falmey, Eknewen: Le silence des traîtres, face aux flots de sang des martyrs. Le Niger ne se relève toujours pas de l'un des épisodes le plus sanglant de l'histoire récente de son armée nationale. Sur les 80 soldats déployés dans le cadre d'une patrouille sur les rivages du fleuve, le 26 mai à Boumba-Falmey, 53 manquent à l'appel, tombés dans une embuscade meurtrière, soit 66,25% des effectifs d'une unité qui ont péri. L'Etat, face à ce drame, se mure dans un silence aussi glacial que le sont les eaux du fleuve dans lesquelles certains soldats décédés ont été repêchés. 46 corps, criblés de balles ont été retrouvés à l'endroit où l'embuscade a eu lieu. 14 autres sont portés disparus, considérés, engloutis dans les eaux. Sept de ces disparus ont été retrouvés, hier, jeudi, 29 mai 2025, morts. Le capitaine Abdoul Aziz Moumini Bouréima, fils du Général Tchanga, figure, malheureusement, parmi eux. La junte, au pouvoir, égale à elle-même, dans son habitude devenue une seconde nature, de dissimuler les faits et de manipuler la conscience collective, a subtilement laissé entendre hier, à travers ses réseaux d’influence et de propagande que le capitaine avait été retrouvé, blessé, alors qu'il gisait déjà dans une marre de sang, le corps transpercé de balles. Pour ne pas être démentie, prise en flagrant délit de déni, elle a coupé l'accès à l'internet qui alimente les différents canaux d'information libres et indépendants. Pour le confort de la junte et la satisfaction béate de ses caprices, tout le pays a été transformé en une zone d'exclusion numérique, avec comme toile de fond, la dénégation et un déficit moral dégradant. Voici les noms des soldats dont les corps ont été retrouvés parmi les 14 portés disparus figure: 1. Capitaine Abdoul Aziz Moumouni Boureima 2. Caporal Ayouba Abdou 3. F/C Issoufou Moussa 4. 2e Classe Armayaou Abdouramane 5. Bassirou Toudjani 6. 2e Classe Chapiou Oumarou 7. Amadou Lawali Sept autres, restent encore introuvables, sans doute, noyés ou ignorés par les autorités qui sont versées dans une censure absurde et absolue. Dans le lot des disparus, un lieutenant et six soldats. Seuls, 27 hommes ont survécu. Une glorification sélective et une mémoire mutilée. Le capitaine Abdoul Aziz, tombé récemment sur le champ de bataille, sera enterré demain. Son nom est désormais porté aux nues par les communicants de la junte. Célébré comme un héros national, il est devenu, à travers les canaux officiels et les réseaux de propagande, l’unique visage du sacrifice. Mais cette glorification sélective pose un problème moral grave: elle ignore royalement ses camarades tombés avec lui, eux aussi morts héroïquement dans la défense de leur patrie. Ce silence assourdissant autour de leurs noms, de leurs visages, de leurs familles endeuillées, constitue une injustice inacceptable. L’injustice jusque dans la mort: quand l’oubli tue une seconde fois. Dans sa tombe, le capitaine Abdoul Aziz ne peut connaître le repos, tant l’oubli de ses frères d’armes hante son sacrifice. Lui qui s’est battu aux côtés d’autres hommes, dans une fraternité scellée par le feu et le sang, doit aujourd’hui souffrir une seconde mort: celle de voir ses compagnons effacés de la mémoire nationale. «Il est tombé en héros, mais meurt une seconde fois chaque fois que le nom de ses frères d’armes est passé sous silence.» «Son âme ne peut se réjouir d’un hommage solitaire, quand tant de camarades, tombés à ses côtés, sont livrés à l’oubli. » Pourquoi cette injustice? Pourquoi cette différence, même dans la mort? Le sang versé d’un soldat mérite-t-il une reconnaissance proportionnée à son utilité médiatique ou à sa proximité politique avec le régime? Cette hiérarchisation du sacrifice est une insulte à l’unité des forces armées, et un crime moral contre la fraternité militaire. Lui, au moins n’a pas accepté d’utiliser sa position privilégiée, qui lui permettrait de se caser et de se retrancher dans une forteresse à Niamey, protégé par une garde prétorienne, en profitant des délices du pouvoir comme Tiani et ses acolytes se plaisent à le faire. Il est monté au front, aux côtés de ses hommes pour accomplir sa mission périlleuse de soldat, digne et impavide. Cinquante deux autres soldats ont consenti le même sacrifice que lui en offrant à la patrie leur vie. Ils ont été fauchés par les balles terroristes ou furent victimes de noyade. Pour la plupart, combattants anonymes, oubliés et meprisés, les nouvelles victimes auront fait montre d'un courage exemplaire et se seront toutes montrées dignes de leur uniforme. Qui a pensé rendre les honneurs au commandant du camp d'Eknewen, lui, aussi, ayant livré bataille jusqu'à son dernier soupir, devant ses hommes, animés par la même ferveur patriotique que lui ? Si la junte l'a omis volontairement, la nation, elle, lui reste reconnaissante. Tous ceux qui, comme lui, ont fait face à leurs obligations au péril de leur vie, même s'ils ne sont pas mentionnés dans les discours des autorités et ne bénéficient pas de leur part de tous les hommages et honneurs que leurs sacrifices ultimes imposent, vivront dans les cœurs et consciences des uns et des autres. Une nation n'oublie pas ses meilleurs fils, l'histoire retient les hauts faits d'armes. Le Niger de Tiani se veut un cimetière, à ciel ouvert, pour les enfants de paysans et citoyens modestes, expédiés sur les champs de bataille, par des Généraux, fuyant la guerre, gagnés par l'ivresse du pouvoir, carrents, portés sur la luxure et la débauche. Des hommes, sans honneur, sans scrupules, sans foi ni loi. Ils sont plusieurs à avoir leurs enfants à l'étranger, dans les meilleures universités de France, du Canada et des États-Unis, tandis que ceux des familles déshéritées meurent pour l'intégrité de leur pays et la dignité de leur peuple. Le Niger n'est plus gouverné, faute de dirigeants ayant le sens de l'Etat et soucieux de l'intérêt général. Au sommet de l'Etat, c'est une course effrénée à l'enrichissement personnel et illicite. Les barons du pouvoir militaire rivalisent d'ardeur et de rapacité dans la signature de contrats douteux et l'acquisition de patrimoines immobiliers. L'heure est à une jouissance éhontée des biens de l'Etat et des ressources nationales pour assouvir de bas instincts. L'ambition affichée ne va pas au-delà du comptoir d'un marchand d'illusions. Le sang et le chaos sont le lot quotidien. 112 morts en 48h 112 familles brisées. Combien d'orphelins, condamnés au traumatisme de devoir vivre sans un père protecteur? Combien de veuves inconsolables? Ni compassion ni solidarité des autorités envers tous ces laissés pour compte. Même la mort, n'émeut pas des putschistes, jonchés sur leur petit nuage. Même des carnages à répétition n'éveillent pas leur conscience, si tant est qu'il leur en reste encore. Après avoir enterré vivante la démocratie, la junte répand et distribue la mort, en détournant le regard de toutes les peines causées, en refusant aux victimes et aux familles éplorées l'empathie nécessaire à panser des plaies béantes. Il n'y a pas de deuil national décrété ni des actes d'hommage ou de reconnaissance de l'Etat. Sous le règne de Mahmadou Issoufou qui n'est pas exempt de reproches dans l'ancrage du terrorisme au Niger, les pertes étaient, au moins annoncées, et on songeait à des journées de deuil national. Aujourd'hui, L'Etat a d'autres priorités, d'autres préoccupations brûlantes comme des festivités somptueuses, des manifestations de soutien au pouvoir, l'inauguration de chrysanthèmes, de ronds-points. Issoufou, disait: "Le Niger sera le cimetière des terroristes". Ironie de l'histoire, c'est le terrorisme qui enterre le Niger, ses soldats et plombe son horizon. Dosso: l’armée en colère contre ses chefs. Une vive tension secoue actuellement les Forces armées nigériennes (FAN) dans la région de Dosso. Hier, le Commandant de zone 7 (Dosso), Colonel-Major Mounkaila Seïdou, a été refoulé à l’entrée du site de Boumba par les soldats de la compagnie sinistrée. Ces hommes, endeuillés par la perte de 53 camarades, dont leur propre commandant, ont refusé tout contact avec une hiérarchie militaire qu’ils jugent distante, hypocrite, et complice du silence d’État. Le COMZONE était venu pour “exprimer son soutien”, mais les rescapés lui ont fermé les portes, dans un geste de défiance inédit, symbole d’un divorce entre la base et le sommet de l’armée. Samir Moussa
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