Le Méhari Post de Mohamed AG Ahmedou du MTRM
Le Méhari Post de Mohamed AG Ahmedou du MTRM
June 6, 2025 at 07:55 AM
CHOGUEL MAÏGA : LE PREMIER MINISTRE DE LA DIVERSION Il y a des Premiers ministres qui gouvernent, d’autres qui incarnent. Et puis il y a Choguel Kokalla Maïga : un tribun enflammé qui a confondu le verbe avec le pouvoir, la communication avec l’action, la rhétorique avec la réforme. Trois années passées à haranguer les foules, à vilipender l’Occident, à distribuer les anathèmes comme des bonbons nationalistes… pendant que l’État s’effondrait. Une gesticulation souverainiste sans souveraineté. Un théâtre politique sans politique publique. Une diversion à échelle nationale. Le tribun sans pouvoir Choguel Maïga n’a jamais dirigé un gouvernement. Il a animé un plateau. Orateur hors pair, il a offert à la junte une vitrine flamboyante : celle d’un civil au verbe haut, bon client médiatique, capable de détourner l’attention des Maliens de ce qui comptait vraiment. À l’ONU, en 2021, il accuse la France d'"abandon en plein vol": coup de poing verbal, standing ovation panafricaine. Mais derrière le coup d’éclat, aucun plan, aucune politique, aucune réforme. Il était plus utile de crier contre la CEDEAO que de restructurer l’administration. Plus glorieux de dénoncer l'"Occident complice des terroristes" que de sécuriser les campagnes ou relancer l’économie. Résultat : un pays toujours à genoux, une économie exsangue, une transition qui s’éternise, et une parole publique qui s’use à force de promesses creuses. La souveraineté mimée Choguel Maïga s’est rêvé libérateur. Il n’aura été que le messager d’une nouvelle tutelle. À la France, honnie, il a substitué la Russie, courtisée avec une ferveur inquiétante. Mais derrière le "partenariat gagnant-gagnant" se cache une dépendance sécuritaire opaque, incarnée par le groupe Wagner. Ce choix stratégique (lourd, risqué, engageant) n’a fait l’objet d’aucun débat parlementaire, d’aucune transparence. Juste un slogan : "Le Mali a retrouvé sa souveraineté". Faux. Le Mali a changé de protecteur, sans consulter son peuple. Il a troqué une tutelle visible contre une tutelle indicible. Une recolonisation rampante, cette fois sans missionnaire ni drapeau, mais avec mercenaires, accords secrets, et propagande bien huilée. La Constitution du verrouillage Son "chef-d’œuvre" politique, la Constitution de 2023, n’est rien d’autre qu’un coup d’État juridico-institutionnel. Une réforme écrite en cercle fermé, validée dans le silence des baïonnettes, imposée sous couvert de "refondation". Elle renforce l’exécutif jusqu’à l’asphyxie, marginalise les contre-pouvoirs, et grave dans le marbre l’autoritarisme transitoire de la junte. Pas de débat national. Pas de consensus. Pas de contrôle. Juste une loi fondamentale brandie comme un talisman patriotique, alors qu’elle enterre, en réalité, la démocratie malienne sous un manteau de mots creux : "souveraineté", "rupture", "refondation". Le vocabulaire est révolutionnaire. La pratique est monarchique. Un pays abandonné à lui-même Et pendant ce temps, que vivait le peuple ? L’inflation galopante, l’insécurité persistante, l’école en lambeaux, les hôpitaux en détresse. Aucun plan économique digne de ce nom. Aucune politique industrielle, agricole, ou sociale. Rien. Le tissu productif est en ruine. Le chômage des jeunes atteint des niveaux explosifs. Et les finances publiques sont aspirées dans des réseaux d’enrichissement illicite. Le Bureau du Vérificateur général a révélé en 2023 des détournements massifs, y compris à la Primature. Où sont les sanctions ? Où sont les enquêtes ? Où est l’exemplarité tant promise ? Le dénonciateur de la corruption d’hier s’est accommodé des vieilles combines. Il n’a pas moralisé l’État. Il l’a normalisé dans sa dérive. Kidal, le silence du théâtre Même la "reconquête" de Kidal, présentée comme le symbole ultime de la restauration de l’autorité de l’État, sonne creux. Car au-delà du drapeau hissé, rien n’a suivi. Aucun plan de reconstruction, aucun dispositif de services publics, aucun dialogue sincère avec les populations. Juste un silence. Un vide. Un fantasme de victoire. Choguel, d’ordinaire si prompt à prendre la parole, s’est tu. Lui, l’homme des micros, s’est effacé quand il fallait parler de paix, de vivre-ensemble, de projet. Parce qu’il n’y avait rien à dire. Et surtout rien à proposer. Le Nord du Mali n’a jamais été autre chose, pour lui, qu’un décor dans la pièce qu’il jouait à Bamako. La chute du bonimenteur Limogé en novembre 2024 pour avoir osé suggérer timidement une fin de la transition, Choguel Maïga est tombé comme tombent tous les illusionnistes : dans l’indifférence. Il croyait être devenu indispensable. Il n’était qu’un accessoire. Un haut-parleur utile, sacrifié dès qu’il a voulu rappeler que le pouvoir n’était pas éternel. Sa chute est une leçon cruelle : dans un régime autoritaire, même les meilleurs serviteurs finissent dans les marges. Choguel n’a jamais été un leader. Il fut un amplificateur. Et comme tout instrument, on l’éteint quand le message change. Un symbole d’échec national Choguel Kokalla Maïga incarne une tragédie typiquement malienne : celle des politiciens à grandes phrases, à patriotisme lyrique, mais à projets vides. Il n’a rien réformé. Il n’a rien construit. Il a offert au peuple une guerre de mots pendant qu’on lui volait ses droits, ses revenus, et ses espoirs. Il n’est pas le seul responsable, mais il en est la figure la plus visible. Et à ce titre, il devra répondre non pas devant la junte, ni devant ses anciens complices, mais devant le peuple malien. Celui qu’il a flatté avec des slogans. Celui qu’il a détourné de ses vrais problèmes. Celui qu’il a trahi. Le Mali n’a pas besoin de bonimenteurs souverainistes. Il a besoin de dirigeants lucides. De bâtisseurs silencieux. De courage politique, pas de fureur médiatique. La transition a échoué. Et Choguel Maïga, en aura été à la fois l’arbitre, le commentateur, et la distraction. Bonne fête de Tabaski à tous les musulmans et à toutes les musulmanes. Par Sambou Sissoko.
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