Le Méhari Post de Mohamed AG Ahmedou du MTRM
Le Méhari Post de Mohamed AG Ahmedou du MTRM
June 8, 2025 at 09:11 AM
Et si le vrai problème, c’était nous ? Le problème du Mali aujourd’hui, ce n’est pas seulement la junte. Le vrai problème, plus insidieux, plus profond, plus dérangeant, c’est l’absence de courage collectif. Ce pouvoir militaire ne tient pas parce qu’il est fort, mais parce que nous avons été faibles et divisés jusque-là. Il règne non pas par la légitimité, mais par notre résignation. Nous avons laissé faire. Nous avons cru, un instant d’égarement national, qu’un colonel bombardé Général pouvait devenir un visionnaire. Qu’un coup d’État pouvait devenir une solution. Qu’un uniforme suffisait à incarner la patrie. C’est une illusion. Et l’histoire du Mali la dément avec brutalité : chaque fois que l’armée a pris le pouvoir, elle a échoué. Sans exception. Modibo Keïta, déposé. Moussa Traoré, dictateur pendant 23 ans. Amadou Haya Sanogo, imposture de 2012. Et aujourd’hui, Assimi Goïta, nouvel avatar d’un cycle tragique où le sabre remplace le suffrage, et l’ordre militaire étouffe la volonté populaire. Mais il faut avoir le courage de le dire : à chaque fois, l’armée a été accueillie par les acclamations d’un peuple désabusé, par la complaisance d’intellectuels ambigus, par le silence complice de chefs politiques et/ou religieux plus soucieux de leur position que de leur mission. Ce n’est pas seulement la junte qu’il faut condamner. C’est aussi notre compromission. La transition actuelle n’en est pas une. Elle est un simulacre. Une mise en scène politique pour habiller une confiscation de pouvoir. À coups de réformes cosmétiques, de discours martiaux et de procès médiatiques, on tente de donner l’apparence d’un changement. Mais en réalité, rien ne bouge, sinon le calendrier, constamment manipulé pour durer. La junte ne veut pas organiser des élections. Elle veut organiser sa propre survie. Et pour cela, elle instrumentalise le patriotisme, détourne le sentiment souverainiste à des fins autoritaires, et transforme toute critique en "trahison". Mais le vrai patriotisme, ce n’est pas de se soumettre aux fusils. C’est de refuser l’injustice, même quand elle parle bambara, même quand elle chante l’hymne national. On nous dira : "Mais ils ont les armes." C’est vrai. Mais le peuple a le nombre. Ils ont l’ORTM ? Le peuple a la souffrance, la vraie, celle qui se vit sans micro, sans décor, sans script. Ils ont les blindés ? Le peuple a la colère des mères, la rage des jeunes, l’exaspération de ceux qui crèvent en silence. Ils peuvent contrôler les casernes, mais ils ne contrôleront jamais la soif de dignité. Pas éternellement. Ce régime tombera. Par fatigue, par contradiction interne, par rejet populaire ou par effondrement économique. Il tombera, c’est inévitable. Mais la vraie question est la suivante : Tombera-t-il avant que le pays ne soit totalement brisé ? Avant que notre jeunesse ne perde définitivement foi en l’avenir ? Avant que les tensions sociales ne dégénèrent en affrontements ? Avant que le désespoir ne devienne irréversible ? L’histoire jugera. Mais avant elle, le peuple doit parler. Et parler fort. Il doit briser le silence. Déchirer la peur. Abattre l’illusion. Parce qu’en fin de compte, la junte n’est qu’un symptôme. Le vrai poison, c’est notre passivité. Et c’est cela qu’il faut extirper si nous voulons redevenir maîtres de notre destin. Sambou Sissoko.
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