
FOCODE Magazine
May 23, 2025 at 08:59 PM
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Dix ans après l’assassinat de Zedi Feruzi : une attente persistante de vérité et de justice
23 mai 2015 – 23 mai 2025 : Un crime resté impuni
Dix ans après l’assassinat de Zedi Feruzi, les circonstances du crime restent toujours sans éclaircissement officiel. Le 23 mai 2015, alors qu’il regagnait son domicile à pied après une réunion de son parti, l’Union pour la Paix et la Démocratie (UPD-Zigamibanga), Zedi Feruzi a été abattu à Ngagara, dans le nord de Bujumbura, aux environs de 19 heures. Il était accompagné de deux policiers chargés de sa sécurité et a été surpris alors qu’il échangeait brièvement avec son voisin, le journaliste Jean-Baptiste Bireha.
Selon les témoignages recueillis, une voiture de marque Toyota TI, inconnue dans le quartier, a effectué un demi-tour sur le boulevard Monseigneur Buconyori avant de s’arrêter à leur hauteur. Des hommes armés en sont sortis, vêtus d’uniformes similaires à ceux de l’unité API (Appui à la Protection des Institutions), une brigade policière dédiée à la protection présidentielle. Ils ont ouvert le feu à bout portant, tuant sur-le-champ Zedi Feruzi et l’un de ses gardes du corps, Eric Bigirimana. Le journaliste Jean-Baptiste Bireha et le second policier, Ezéchiel Ndayisaba, ont été grièvement blessés. Les assaillants ont ensuite lancé des grenades, avant de quitter les lieux sans être inquiétés.
Les éléments disponibles à ce jour laissent penser qu’il s’agissait d’une opération ciblée, planifiée. Des sources internes, corroborées par l’enquête menée par le Forum pour la Conscience et le Développement (FOCODE), évoquent l’implication directe de membres de l’unité API, dont les brigadiers Jonas Ndabirinde et Jean Nimenya, tous deux cités dans d’autres dossiers d’exécutions extrajudiciaires. La voiture utilisée aurait été repérée peu après à proximité de la permanence nationale du CNDD-FDD, avant que ses occupants ne regagnent discrètement leur caserne.
Le comportement du chauffeur de Zedi Feruzi, Pacifique Nshimirimana, a par ailleurs soulevé de nombreuses interrogations. Ancien démobilisé du CNDD-FDD, il n’a pas été blessé lors de l’attaque et aurait immédiatement récupéré les téléphones et des documents appartenant à la victime. Selon plusieurs sources, il aurait été brièvement détenu par le Service National de Renseignement (SNR), puis relâché sans inculpation. Des soupçons pèsent sur une possible complicité dans la préparation ou la facilitation de l’attentat.
À ces éléments s’ajoute le contexte politique du moment. Quelques jours avant son assassinat, Zedi Feruzi avait publiquement pris position contre le troisième mandat du président Pierre Nkurunziza. Le 19 mai, il avait tenu un discours sans équivoque devant les manifestants du quartier Musaga, exprimant son soutien au mouvement de contestation. Il aurait également, peu de temps auparavant, refusé une proposition de soutien électoral formulée par des cadres du parti présidentiel. Ce changement de position, après des années de relative proximité avec le pouvoir, aurait été perçu comme une rupture difficilement acceptable.
Depuis ce 23 mai 2015, aucune enquête judiciaire sérieuse n’a été menée par les autorités burundaises. Aucune personne n’a été arrêtée, aucun procès n’a eu lieu. Les survivants et les proches de Zedi Feruzi ont au contraire été confrontés à des menaces, des intimidations, et pour certains, à l’exil forcé. Le journaliste Jean-Baptiste Bireha, grièvement blessé, a dû fuir le pays après avoir été désigné comme témoin gênant. La veuve de Zedi Feruzi, Marie-Louise Nshimirimana, a également quitté le Burundi après avoir appris qu’un avis de recherche avait été lancé contre elle, dans des circonstances suspectes.
Dix ans plus tard, les faits demeurent inchangés : un homme politique a été tué en pleine rue, dans des conditions qui impliquent possiblement des agents de l’État, et aucune action judiciaire n’a été entreprise. Le FOCODE continue de considérer ce meurtre comme un crime à caractère politique, commis dans un contexte de répression visant les opposants à la candidature controversée de Pierre Nkurunziza.
En ce 10e anniversaire, le FOCODE renouvelle sa demande pour une enquête internationale, indépendante et transparente. Il appelle également la Cour pénale internationale à inclure ce dossier dans son examen des crimes commis au Burundi depuis 2015. Au-delà de la mémoire de Zedi Feruzi, il s’agit de faire respecter le droit à la justice pour toutes les victimes de violences politiques au Burundi.
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