FOCODE Magazine
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June 10, 2025 at 09:25 AM
https://x.com/FOCODE_/status/1932361623697559572?t=XgOCSZ0BYfNfqxqcUCreCw&s=19 À quoi sert la mission d’observation électorale de l’Union africaine ? #focodemagazine | 10 juin 2025 Alors que la Mission d’observation électorale de l’Union africaine (UA) salue le bon déroulement des élections législatives et communales du 5 juin 2025 au Burundi, une tout autre réalité émerge des témoignages de l’opposition et de la société civile : fraudes massives, répression politique, intimidation des électeurs. Ce profond décalage pose une question fondamentale : la mission de l’UA sert-elle encore la démocratie, ou n’est-elle devenue qu’un cache-sexe diplomatique pour des régimes autoritaires ? Dans sa déclaration préliminaire rendue datée du 07 juin 2025, la mission de l’UA salue le « professionnalisme » de la Commission électorale (CENI) et des acteurs politiques, et se félicite d’un climat de « calme » et de « maturité démocratique ». À première vue, tout semble avoir fonctionné dans les règles. Or, cette lecture apparaît en totale contradiction avec les faits rapportés par l’opposition et les différents témoignages collectés sur le terrain. L’Union pour le Progrès national (UPRONA), le Conseil national pour la liberté (CNL), ainsi que la coalition « Burundi bwa Bose », dénoncent des fraudes systématiques et une mise en scène électorale verrouillée par le parti au pouvoir. Les abus rapportés sont nombreux et graves : 1⃣ Bourrage d’urnes avant l’ouverture des bureaux de vote 2⃣Vote par procuration forcé, avec confiscation de bulletins 3⃣Accompagnement illégal dans l’isoloir par des militants du CNDD-FDD ; 4⃣ Scrutin à découvert sous surveillance pour intimider les votants ; 5⃣Présence de la milice Imbonerakure dans les centres de vote ; 6⃣Expulsion des mandataires de l’opposition et falsification des procès-verbaux. Malgré cette avalanche de violations, le rapport de l’UA n’en fait mention qu’à travers une formule évasive : « certaines préoccupations exprimées par des partis politiques ». Ce choix lexical, volontairement flou, traduit une volonté de neutralité diplomatique — qui devient, en réalité, une forme de complicité tacite. Un schéma récurrent : tolérance envers l’autoritarisme civil Le cas burundais s’inscrit dans une tendance plus large. Loin d’être un écart ponctuel, il illustre un schéma désormais familier : l’Union africaine condamne fermement les coups d’État militaires, mais se montre complaisante envers les régimes autoritaires installés par des processus électoraux truqués. Cette asymétrie est problématique. En refusant de nommer les dérives, l’UA entretient une illusion de légalité. Elle conforte des dirigeants qui s’accrochent au pouvoir par la manipulation des institutions, la criminalisation de l’opposition et la mise au pas des contre-pouvoirs. Elle abandonne les citoyens à leur sort, affaiblissant du même coup sa légitimité. L’argument selon lequel l’UA privilégierait la stabilité n’est plus tenable : une démocratie confisquée génère à terme davantage de violence, d’instabilité et de migration forcée que l’instauration d’un véritable État de droit. Que devrait faire l’Union africaine ? Si l’Union africaine veut redevenir un acteur crédible du processus démocratique en Afrique, elle doit rompre avec la logique de validation automatique des scrutins. Plusieurs axes de réforme s’imposent : 1. Recentrer l’évaluation sur la transparence réelle du processus L’UA ne peut plus se contenter de constater l’absence de violence le jour du scrutin. Elle doit juger de la régularité globale : accès équitable aux médias, impartialité des institutions, liberté de campagne, sécurité des votants, indépendance des observateurs nationaux. 2. Reconnaître et documenter les violations des droits humains L’organisation doit produire des rapports rigoureux, appuyés sur des faits, y compris en citant les abus et atteintes aux libertés. Elle doit se doter d’une capacité d’investigation indépendante, au-delà des briefings officiels. 3. Intégrer la société civile dans ses mécanismes d’observation Les ONG, journalistes, défenseurs des droits humains et exilés doivent être considérés comme des interlocuteurs légitimes, pas comme des perturbateurs. Leurs voix enrichissent le diagnostic, loin des narratifs étatiques verrouillés. 4. Favoriser un dialogue politique inclusif et structurant Au lieu de se contenter de rapports d’observation, l’UA doit s’engager activement dans la facilitation d’un dialogue national. Celui-ci doit viser des réformes structurelles : indépendance de la CENI, dépolitisation de la justice et des forces de sécurité, garantie des libertés fondamentales. Une Union africaine à reconstruire par le bas En validant des élections viciées, l’Union africaine ne protège ni la démocratie, ni la stabilité. Elle affaiblit la confiance des peuples en l’idée même d’alternance, et se coupe des sociétés civiles qu’elle devrait défendre. La démocratie ne se résume pas à la tenue périodique de scrutins : elle exige des institutions solides, des contre-pouvoirs vivants et une culture du débat. Les peuples africains méritent une Union africaine à la hauteur de leurs aspirations. Une UA qui ne se contente plus de « missions d’observation » symboliques, mais qui s’engage véritablement aux côtés des citoyens pour construire des régimes légitimes, responsables et représentatifs. Faute de quoi, l’organisation risque de n’être qu’un théâtre diplomatique, sans impact réel sur le devenir démocratique du continent. #focodemagazine | Gordien Niyungeko @AfricanUnion , @GeneralNeva , @achpr_cadhp , @KwaNtare , @NtareHouse , @CNIDH_Bdi , @CeniBurundi , @EurAc_Net , @NadineMballa2 , @bikjo , @DefendDefenders , @CIVICUSalliance , @hivos , @KIOSFoundation , @NEDemocracy , @ccpr_centre_fr , @AmnestyWARO , @amnestynl , @hrw_fr , @ASF_NGO , @cncd111111
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