FOCODE Magazine
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June 12, 2025 at 10:19 AM
https://x.com/FOCODE_/status/1933104625093058645?t=C7nNmewvtTv3vjsTDcQkQg&s=19 Mascarade électorale inédite : quelles conséquences pour le Burundi ? #focodemagazine | 10 juin 2025 Les élections législatives et communales du 5 juin 2025 resteront gravées comme l’un des épisodes les plus controversés de la vie politique burundaise. Elles ont été entachées de fraudes massives orchestrées par le CNDD-FDD, avec la complicité de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et de ses démembrements (CEPI et CECI). Du bourrage d’urnes avant même le début du vote à la falsification des procès-verbaux, en passant par l’intimidation et l’expulsion des mandataires des partis d’opposition, tout a été mis en œuvre pour assurer une victoire écrasante – et peu crédible – de 99 % au parti au pouvoir. Les résultats provisoires déjà proclamés par la CENI n’ont laissé aucune place à la surprise : le CNDD-FDD rafle tout. Mais à quel prix ? 🔴1.Des manifestations pacifiques impossibles Cette manipulation électorale de grande ampleur ne peut que nourrir une profonde frustration parmi les Burundais déjà exaspérés par l’incompétence et la corruption du régime. Le quotidien reste marqué par des pénuries, comme celle du carburant, et par une dégradation continue des conditions de vie. Dans un pays respectueux des libertés fondamentales, ce type de situation conduirait naturellement à des manifestations pacifiques. Mais au Burundi, la peur règne. Lors d’un point de presse tenu le 9 mai, le président du parti d’opposition CNL, Nestor Girukwishaka, a dénoncé les « graves irrégularités » du scrutin et appelé à ne pas reconnaître les résultats. Pourtant, il a fini par inviter ses militants à « rester tranquilles et unis ». On sent donc que les politiciens de l’opposition ont peur d’appeler à des manifestations pacifiques qui pourtant sont garanties par la Constitution. Tout le monde a encore en tête la répression sanglante qui a suivi les manifestations pacifiques de 2015 contre le troisième mandat de Pierre Nkurunziza, et personne ne veut assumer le carnage qui risque de s’en suivre. 🔴2.Une justice inféodée au pouvoir Face à ces irrégularités massives, une démocratie digne de ce nom verrait ses tribunaux jouer un rôle d’arbitre impartial. Ce n’est pas le cas au Burundi, où la justice reste entièrement soumise au CNDD-FDD. L’expérience de 2015 l’a démontré : malgré les contestations, la Cour constitutionnelle avait validé un troisième mandat illégal de Pierre Nkurunziza. La Cour de justice de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) a fini par reconnaître l’illégalité de ce mandat. Trop tard. Le message envoyé à la population est clair : aucun recours interne ne peut corriger les abus électoraux, surtout s’ils sont orchestrés par le parti au pouvoir. 🔴3.La tentation de la violence Dans ce contexte, la question qui se pose est brutale : que reste-t-il quand on ne peut ni manifester, ni saisir une justice indépendante ? Certains au pouvoir espèrent que les Burundais se contenteront de courber l’échine jusqu’à la prochaine mascarade électorale. Mais l’histoire montre que l’étouffement des voies d’expression pacifique peut conduire à des explosions de violence. Le politologue Crane Brinton, dans The Anatomy of Revolution (1938), a montré que lorsqu’un régime devient irréformable, il s’expose à des ruptures brutales. Le CNDD-FDD, en verrouillant le système et en poussant à bout une population déjà meurtrie, prend le risque de radicaliser une partie de l’opposition. Certains pourraient conclure qu’il n’existe aucune voie pacifique vers l’alternance au Burundi, et être tentés de rejoindre des groupes armés convaincus que seule la force pourra provoquer le changement. En niant toute possibilité d'expression libre et de recours légal, le pouvoir burundais joue avec le feu. L’histoire du Burundi et de la région des Grands Lacs est riche d’exemples tragiques où le refus du dialogue a ouvert la voie aux armes. À force de mépriser les règles du jeu démocratique, le CNDD-FDD pourrait bien provoquer ce qu’il prétend vouloir éviter : un nouveau cycle de violence que ni le pays ni la région ne peuvent se permettre. #focodemagazine | Gordien Niyungeko

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