
EuroScope : la chaîne sur l’Europe
June 11, 2025 at 02:26 PM
*L’ACTE EUROPÉEN DES RÉSEAUX NUMÉRIQUES : VERS UN TRAITÉ DE FIBRE, D’AIR ET D’ONDES*
Le 6 juin 2025, la Commission a entrouvert la porte d’un chantier législatif qui pourrait redessiner l’ossature numérique du continent : l’Acte sur les réseaux numériques (Digital Network Act, DNA). Par son appel à contribution — ouvert jusqu’au 11 juillet — Bruxelles invite opérateurs, industriels, territoires et citoyens à modeler un texte appelé à fusionner, simplifier, libérer. Car l’Europe, forte de sa volonté d’autonomie stratégique, sait que l’excellence industrielle de demain dépend d’autoroutes optiques, de passerelles 6G et de nuages souverains où circuleront les flux d’une intelligence artificielle gourmande en bande passante.
*UN DOUBLE PARI : HARMONISER ET DÉCOMPLEXIFIER*
Depuis trois décennies, la mosaïque des régulations nationales s’est superposée à un acquis communautaire devenu foisonnant : Code européen des communications électroniques, règlement Open Internet, BEREC, programmes pour le spectre radioélectrique. Résultat : des délais de transposition qui s’étirent, des obligations de reporting qui étouffent, des innovations freinées à la frontière. Le DNA ambitionne d’abattre ces cloisons en réduisant de moitié la paperasse réglementaire, en alignant les conditions d’autorisation et en offrant aux fournisseurs B2B, aux acteurs de l’IoT et aux nouveaux entrants une route dégagée vers un marché unique enfin tangible.
*LE SPECTRE, CLEF DE LA COMPÉTITIVITÉ 6G*
La bataille mondiale pour la 6G se gagne d’abord dans les coulisses des enchères hertziennes. Le futur règlement entend prolonger les licences, simplifier les renouvellements, encourager le partage dynamique des fréquences et instaurer une feuille de route commune qui évitera les goulets nationaux. Grâce à une procédure d’examen par les pairs musclée, le DNA veut garantir une attribution simultanée sur tout le territoire de l’Union, prémices d’un réseau paneuropéen capable d’alimenter véhicules autonomes, jumeaux numériques industriels et métavers immersifs.
*UNE NEUTRALITÉ DU NET RÉINVENTÉE, DES SERVICES INNOVANTS LIBÉRÉS*
Face à la montée en puissance des applications à faible latence — chirurgie à distance, réalité augmentée, gaming cloud — l’interprétation actuelle de l’Internet ouvert atteint ses limites. Sans renier la liberté de circulation des paquets, le DNA pourrait clarifier la création de « voies dédiées » pour les usages critiques, tout en confiant aux régulateurs un arsenal pour empêcher discriminations et abus. Ainsi naîtra une neutralité du net version 2, équilibrant équité et qualité de service.
*PLAN FIBRE : VERS L’ADIEU AU CUIVRE*
L’Europe veut tourner la page des fils de cuivre. Le texte projette des plans nationaux de switch-off obligatoires, assortis d’une date européenne de fermeture, tout en prévoyant des échappatoires pour les zones où aucune alternative n’existe encore. Un produit d’accès harmonisé, imposé ex-ante aux opérateurs dominants, apportera prévisibilité et stimulera la concurrence sur des réseaux intégralement optiques.
*UNE GOUVERNANCE MUSCLÉE POUR UN MARCHÉ UNIQUE VIVANT*
Pour orchestrer ce concerto, la Commission envisage de renforcer les muscles institutionnels. BEREC, son Bureau et le RSPG pourraient se voir dotés de pouvoirs décisionnels accrus, capables de trancher les litiges transfrontaliers, de piloter les grands appels d’offres satellites et d’unifier la métrique des indicateurs de performance. C’est la condition sine qua non pour qu’une start-up de Vilnius puisse déployer sans friction un réseau privé 5G à Porto, ou qu’un fabricant de modules IoT de Lyon connecte des capteurs en Laponie.
*FINANCEMENT : L’UNIVERSAL SERVICE À LA CROISÉE DES CHEMINS*
Trois études s’ajouteront aux contributions : elles évalueront l’intégration des réseaux transfrontaliers, la politique d’accès et le financement du service universel dans un environnement full-fibre, full-5G et lunette 6G. Car le défi reste massif : plus de 200 milliards d’euros pour moderniser les infrastructures d’ici 2030. Le DNA devra donc articuler subventions, prêts BEI, fonds de cohésion et investissements privés, tout en laissant la créativité du marché produire les solutions les plus efficientes.
*CONCLUSION*
Le Digital Network Act ne sera pas un simple toilettage législatif : il s’annonce comme l’équivalent numérique de l’Acte unique de 1986, fusionnant le cuivre, la lumière et l’éther en un continuum compétitif. À la croisée de la géopolitique du spectre, de la transition verte et de la souveraineté des données, il écrira les règles d’un continent où l’innovation ne trébuche plus sur des frontières administratives. Le temps est donc compté : parties prenantes, faites entendre votre voix avant le 11 juillet. Car c’est à la mesure de ces contributions que l’Europe saura, à l’automne 2025, enfanter un règlement capable d’élever ses réseaux au rang d’infrastructures stratégiques, garantes d’une prospérité résiliente et d’une liberté numérique authentiquement européenne.
https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/14709-Digital-Networks-Act_fr
#euroscope #digitalnetworkact #6g #fibre #spectreradioélectrique #marchéunique
https://buymeacoffee.com/euroscope