
Actualités Brûlantes du Sahel
June 2, 2025 at 10:18 AM
SAHEL:
Un week-end, très noir, annonciateur de fins de règnes brutales et très prochaines
Le Sahel , part en vrille. En l'espace de quelques heures, les armées du Mali et du Burkina Faso , ont subi des affronts comme ce n'était jamais arrivé auparavant ni enregistré dans les annales. Des attaques, menées, simultanément, très bien coordonnées, d'une redoutable efficacité , se sont abattues comme un violent orage, sur les deux pays. Des positions stratégiques ont été frappées, durement. Des bastions sont tombés. Les défaites ont un impact militaire désastreux surtout comportent des signaux inquiétants d'une escalade en marche et d'une certaine faille stratégique abyssale.
Bamako, ouagadougou, voire Niamey, capitales respectives du Mali, du Burkina et du Niger, sont désormais à la merci des groupes armés terroristes. La guerre n'est plus circonscrite à des pans déterminés mais concerne toute l'étendue des territoires des Etats concernés.
Boulkessi : une forteresse d'élite balayée , avant d'être exhibée au monde
Au Mali, le point culminant du déclin sécuritaire flagrant aura sans doute été le ravage de Boulkessi, camp militaire emblématique de la région de Mopti. Ce poste avancé, situé à la frontière avec le Burkina, abritait plus de 500 soldats d'élite, issus de Kati. Il s'agit de la crème des forces armées maliennes ( FAMA). Ces éléments sont appuyés par des mercenaires russes du groupe Wagner. Le 1er juin 2025, cette base est tombée après un assaut du groupe de soutien à l'islam et aux musulmans ( JNIM), lors d'une opération éclair, imparable et foudroyante.
Ce n'est pas que le caractère violent de l'opération qui a sidéré l'opinion. Il y a aussi la manière dont les assaillants ont mis en scène leur triomphe. En une fraction de temps, des vidéos glaçantes, ont inondé les réseaux et les canaux de propagande djihadiste. On y voit les installations du camp dévastées, des pick-up militaires calcinés, des armes saisies. On est plus atteré encore d'apercevoir des dizaines de corps de soldats maliens , criblés de balles, joncher le sol. Certains, portent encore leur uniforme, d'autres sont à moitié dévêtus. Des visages sont reconnaissables.
Les corps sans vie sont entassés dans des fossés, situés à l'entrée du camp.
Une autre scène dégradante, reste celle d’un captif, présenté , comme le commandant de la base, capturé, vivant, montré les mains attachées derrière le dos, apparu en culotte . Présenté comme un trophée de guerre dans une vidéo d'exhibition indécente, l'infortuné officier, est exposé à la face du monde comme une bête de somme. Il est soumis à un traitement humiliant et traumatisant, sous les yeux de sa hiérarchie, de sa nation et du monde entier.
Mais l’ignominie ne s’est pas arrêtée là. Comme si la chute de Boulkessi ne suffisait pas, comme si l’exposition publique de cadavres de soldats ne suffisait pas, le JNIM a publié une nouvelle vidéo encore plus humiliante, plus indigne, plus insoutenable. On y voit de jeunes soldats faits prisonniers, les yeux bandés, ligotés comme des bêtes, assis à même le sol, obligés de manger un plat qu’on leur sert à la manière d’un troupeau, avec des gestes de moquerie, de domination. Les ravisseurs djihadistes, hilare, les traitent comme du bétail de somme. Pas un mot, pas un cri, pas un sursaut de solidarité de la part de ceux qui gouvernent à Bamako.
Et pourtant, pendant que ces jeunes enfants du peuple tombent, sont exécutés, ou humiliés comme du bétail, ceux qui tiennent le pouvoir à Koulouba vivent dans l’ivresse du pouvoir, bien au chaud, protégés, entourés, flattés. Ils paradent en uniforme repassé, multiplient les discours à la télévision, s’érigent en “sauveurs de la nation”, pendant que la nation se vide de ses enfants. Les généraux de salon, les colonels planqués, les communicants du régime vivent dans le confort, la sécurité et la suffisance, tandis que la jeunesse est sacrifiée.
Cette scène — cette vidéo — est un déshonneur historique pour le Mali. Elle est une gifle à l’honneur militaire, un affront à la mémoire des soldats, un crachat en pleine figure de toute la République. Ce n’est plus une défaite militaire. C’est une descente aux enfers morale et humaine. Et ceux qui laissent faire, qui ne disent rien, ne méritent ni les galons qu’ils portent, ni le pouvoir qu’ils usurpent.
Bien sûr, Bamako, n'a prononcé aucun mot, encore moins, n'a été secourir ses hommes.
Chaque jour, maintenant, l'on passe d'une guerre d'usure et de la vague habituelle d'embuscades meurtrières, à une logique de confrontation franche, directe et frontale. L'on tient à crée, à tout prix, la psychose, en répandant la terreur, en ne ménageant guère l'ennemi.
Le camp militaire de Boulkessi constitue depuis plus d’une décennie l’un des verrous sécuritaires les plus importants du centre du Mali. Situé dans la région de Mopti, à proximité immédiate de la frontière burkinabè, il se trouve au cœur de la zone dite des trois frontières (Mali, Burkina Faso, Niger), épicentre de la menace jihadiste dans le Sahel. Boulkessi n’est pas une simple garnison : c’est un poste avancé de projection, un centre logistique, un pivot tactique pour le contrôle des mouvements transfrontaliers entre les régions de Douentza, de Djibo et de la province burkinabè du Soum. Il abritait des unités d’élite des FAMa, notamment des commandos parachutistes, et servait de base d’appui aux opérations conjointes du G5 Sahel jusqu’au retrait du Mali. Sa chute ne représente donc pas seulement une perte humaine et matérielle colossale, mais un effondrement symbolique et opérationnel : elle ouvre un couloir aux groupes armés entre le nord du Burkina et le centre du Mali, affaiblit les défenses de Mopti, compromet la sécurité de Sévaré et met en péril tout le dispositif militaire malien dans la région. Perdre Boulkessi, c’est perdre un nœud de contrôle stratégique du centre sahélien.
Mondoro, Didiéni, Kimprana : les combats cessent, faute de combattants
Le 1er juin 2025 encore, le camp de Mondoro, proche de Boulkessi, a été frappé par une autre offensive. Cette attaque semble avoir été lancée, en même temps , que la précédente , suivant le même standard tactique : encerclements, bombardements, suivis de destructions massives.
Là aussi, des vidéos confirment que les insurgés ont réussi à se rendre maîtres des lieux. Plusieurs soldats, gisent à même le sol, exécutés ou morts au combat.
Les survivants, se sont sauvés dans une véritable cohue.
Il n'y a eu aucun renfort ni secours.
Sur les axes de Didiéni-kouloukani, koumantou ( Sikasso), San-kimprana ( Ségou), des engins explosifs improvisés, ont visé des convois logistiques et des patrouilles. Partout, la panique, s'installe. Le sud et le centre du Mali sont maintenant touchés. La menace se propage et peu à peu remonte vers Bamako qui demeure une cible privilégiée. Quant à la reconquête de Tinzawaten, jadis chantée sur tous les tons comme un exploit héroïque, elle semble désormais avoir été soigneusement rangée dans les archives mythologiques, quelque part entre l’Atlantide et les calanques grecques.
Koumbri tombe, Ouahigouya, dans la ligne de mire
Au Burkina Faso, le tableau n'est pas plus reluisant et rassurant. Le 31 mai 2025, les localités de Vaongho, Arbinda, Boala, kelbo et surtout koumbri ont été attaquées.
A koumbri, dernier verrou militaire avant Oouahigouya, la garnison a été envahie, incendiée et totalement delestée de ses moyens. Au moins 40 soldats ont été fauchés. Les djihadistes ont réussi à mettre la main sur le matériel, les stocks de carburant, les documents sensibles. Des images montrent les dépouilles des militaires : des corps, mutilés, d'autres, abandonnés, calcinés, dans des véhicules, incendiés. La scène rappelle celle de Djibo, en mai, dernier.
Désormais, Ouahigouya, qui abrite le prestigieux 12e régiment d'infanterie commando n'est plus protégée. Elle est à la portée des groupes armés terroristes.
Arbinda, kelbo, Boala : la dislocation des lignes secondaires
Dans les zones d'Arbinda et de Kelbo, les positions ont été desertées après de brèves escarmouches. Des pick-up , ont été détruits, des VDP tués . Des véhicules militaires ont été récupérés.
A Boala, la gendarmerie, a été assiégée. Il n'a pas été opposé la moindre résistance aux assaillants.
Les groupes armés, tiennent, chaque fois, à avoir des preuves en images ou vidéos de toutes leurs prises de guerre afin de les brandir devant l'opinion. Ainsi, des soldats, tués, sont-ils exhibés comme des palmes honorifiques et actes héroïques.
Un silence coupable
Malgré, l'ampleur et l'évidence des pertes , les autorités, ne sortent pas de leur silence ni ne se montrent preoccupées et compatissantes.
A Bamako, aucun haut responsable, civil ou militaire, n'a encore évoqué la déroute de Boulkessi.
A ouagadougou, la chaîne publique d'informations continue de diffuser des spots vantant des victoires imaginaires. Quant au chef de la junte, le capitaine Ibrahim Traorè, depuis deux jours, il est introuvable.
Les autorités malienne et burkinabé sont, du reste, insensibles à l'extermination de leurs soldats : aucun signe de deuil, aucun mot ou geste de solidarité avec les victimes et de compassion envers leurs familles. Les martyrs sont oubliés par ceux qui les ont conduit à une mort certaine.
Entre le 1er et le 31 mai 2025, le Niger a enregistré au moins 245 morts. Deux cent quarante-cinq vies fauchées en un mois, dans un pays qui prétend être “souverain” mais où les citoyens meurent dans l’indifférence totale de ceux qui prétendent les gouverner. Et pourtant, dans sa dernière intervention, le général Tiani n’a même pas daigné en faire mention. Pas un mot. Pas une once de compassion. Aucun hommage. Aucune reconnaissance. Rien. Le silence froid d’un pouvoir qui n’a plus ni cœur ni honte.
Ce mépris est devenu une constante dans tous les pays du Sahel, où les jeunes gens sont sacrifiés comme de la chair à canon pendant que Tiani, Goïta et Traoré, eux, vivent bien au chaud, bunkérisés, cachés, protégés, planqués comme des fuyards, pendant que les enfants du peuple tombent, anonymes, abandonnés, effacés. Cette trahison n’est plus seulement politique. Elle est morale, humaine, impardonnable.
En tout cas, les positions stratégiques qui formaient la ceinture de sécurité autour des capitales ont toutes cédé.
Boulkessi est tombée. Mondoro est sous pression. L'axe Mopti-Ségou est étouffé. Koumbri a été rasée. Oouahigouya, est fortement, menacée. Djibo est assiégée. Kelbo, Abinda, Balda, sont vulnérables.
C'est toute l'ossature défensive des deux
pays qui est affectée et ébranlée.
Bamako, devient poreuse par le Sud et le centre. Ouagadougou est encerclée par l'ouest ( Tougan), le nord ( Oouahigouya), et l'est ( Fada).
Niamey, fragilisée par les récents revers dans la région de Tillia, pourrait être atteinte via Torodi.
Le 1er juin 2025, le Sahel a perdu des soldats. Des camps aussi ont été ravagés.
Des débâcles et drames qui remettent en cause le narratif de la propagande officielle, ternissent l'image des juntes et vont à l'encontre du projet de reconquête de la souveraineté perdue ou bafouée.
Les groupes armés, imposent, dorénavant, leur récit, d'autant captivant, qu'il est émaillé de preuves vivantes, notamment, hélas, les corps de leurs victimes qui sont agités comme épouvantail et étendard.
Les mensonges des Etats ne résistent plus à la réalité et s'écroulent devant les montagnes d'images et tonnes de vidéos véhiculées par les djihadistes qui savent mieux que quiconque qu'une communication efficace se nourrit de faits probants et de preuves irréfutables plutôt que de rhétoriques, d'effets de manches et de déclamations publiques.
Les juntes ont perdu toutes les guerres: après celle du terrain, celle aussi de l'opinion et de l'information dont elles avaient fait leur domaine de prédilection.
Samir Moussa
🙏
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